© L'Arbre brisé. Le long du Larve.

 

Imagine un vieil arbre, autrefois fier et majestueux, dressé vers le ciel avec ses racines profondément ancrées dans la terre et ses branches tendues comme des bras en quête de lumière. Année après année, il a affronté les tempêtes, le gel de l’hiver et la chaleur de l’été, chaque saison laissant son empreinte sur son écorce rugueuse. Ses feuilles, jadis luxuriantes, ont dansé dans le vent, tombant et renaissant dans un cycle sans fin, comme les espoirs que la vie nous donne et nous reprend.

Mais le temps est implacable. Les fines fissures le long du tronc sont devenues des blessures profondes, creusées par la pluie et le vent. Chaque goutte d'eau qui s'infiltre, chaque gel qui pénètre le bois, chaque soleil brûlant qui assèche sa sève, tout contribue à affaiblir sa résistance. Et ainsi, un jour, dans un dernier soupir silencieux, l’arbre se brise en longueur, divisé par cette même vie qui l’avait autrefois nourri.

Ainsi est la vie pour ceux qui affrontent le poids des épreuves. Elle te brise lentement, sans bruit, comme le vent qui use la roche ou la pluie qui érode la montagne. Elle s'insinue dans les fissures les plus cachées du cœur, dans les souvenirs jamais apaisés, dans les espoirs brisés et les rêves inachevés. Chaque déception est une écharde qui s’enfonce dans la fibre la plus profonde, chaque perte une fracture qui s’agrandit, te rendant de plus en plus fragile, de plus en plus exposé.

Et pourtant, même un arbre brisé peut avoir sa beauté. Dans le bois tombé trouvent refuge de nouvelles vies : mousses, insectes, petits animaux qui le transforment en quelque chose de différent, mais pas moins essentiel. De la même manière, ceux qui ont été brisés par la vie peuvent trouver une nouvelle sève, une nouvelle forme, s'ils parviennent à transformer la douleur en force, les cicatrices en histoires à raconter, les fragments en nouveaux départs.

A. Romano